
1. Pour ressusciter avec le Christ, il faut mourir avec le Christ, il faut «quitter ce corps pour aller demeurer auprès du Seigneur» (2 Co 5, 8). Dans son Instruction Piam et constantem du 5 juillet 1963, le Saint-Office avait demandé de «maintenir fidèlement la coutume d’ensevelir les corps des fidèles», précisant toutefois que l’incinération n’est pas «contraire en soi à la religion chrétienne» et qu’on ne devait plus refuser les sacrements et les obsèques à ceux qui demandaient l’incinération, à condition qu’un tel choix ne soit pas motivé par «une négation des dogmes chrétiens, dans un esprit sectaire, ou par haine contre la religion catholique ou l’Église»

Depuis lors, la pratique de l’incinération s’est sensiblement répandue dans de nombreuses nations, mais, dans le même temps, se sont aussi diffusées de nouvelles idées en contradiction avec la foi de l’Église. Après avoir dûment consulté la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, le Conseil pontifical pour les textes législatifs et de nombreuses Conférences épiscopales et Synodes des évêques des Églises orientales, la Congrégation pour la doctrine de la foi a jugé opportun de publier une nouvelle Instruction pour réaffirmer les raisons doctrinales et pastorales de la préférence pour l’inhumation des corps; elle voudrait aussi établir des normes portant sur la conservation des cendres en cas d’incinération.


2. La résurrection de Jésus est la vérité suprême de la foi chrétienne, prêchée comme une partie essentielle du mystère pascal depuis les origines du christianisme: «Je vous ai donc transmis en premier lieu ce que j’avais moi-même reçu, à savoir que le Christ est mort pour nos péchés selon les Écritures, qu’il a été mis au tombeau, qu’il est ressuscité le troisième jour selon les Écritures, et qu’il est apparu à Céphas, puis aux Douze» (1 Co 15, 3-4).

S’il est vrai que le Christ nous ressuscitera «au dernier jour», il est vrai aussi que, d’une certaine façon, nous sommes déjà ressuscités avec Lui. En effet, par le baptême, nous sommes plongés dans la mort et la résurrection du Christ, et assimilés à lui sacramentellement: «Ensevelis avec lui lors du baptême, vous êtes aussi ressuscités avec lui, parce que vous avez cru en la force de Dieu qui l’a ressuscité des morts» (Col 2, 12).


Grâce au Christ, la mort chrétienne a un sens positif. Dans la liturgie, l’Église prie ainsi: «Pour tous ceux qui croient en toi, Seigneur, la vie n’est pas détruite, elle est transformée; et lorsque prend fin leur séjour sur la terre, ils ont déjà une demeure éternelle dans les cieux»
3. Suivant la tradition chrétienne immémoriale, l’Église recommande avec insistance que les corps des défunts soient ensevelis dans un cimetière ou en un lieu sacré4.

En ensevelissant les corps des fidèles, l’Église confirme la foi en la résurrection de la chair8 et veut mettre l’accent sur la grande dignité du corps humain, en tant que partie intégrante de la personne, dont le corps partage l’histoire9.

En outre, la sépulture dans les cimetières ou dans d’autres lieux sacrés répond de manière adéquate à la piété ainsi qu’au respect dus aux corps des fidèles défunts qui, par le baptême, sont devenus temple de l’Esprit Saint et qui ont été «comme les instruments et les vases dont l’Esprit s’est saintement servi pour opérer tant de bonnes œuvres»10.

Enfin, la sépulture des corps des fidèles défunts dans les cimetières ou autres lieux sacrés favorise le souvenir ainsi que la prière de la famille et de toute la communauté chrétienne pour les défunts, sans oublier la vénération des martyrs et des saints. Grâce à la sépulture des corps dans les cimetières, dans les églises ou les espaces réservés à cet usage, la tradition chrétienne a préservé la communion entre les vivants et les morts, et s’est opposée à la tendance à dissimuler ou à privatiser l’événement de la mort ainsi que la signification qu’il revêt pour les chrétiens.

4. Là où des raisons de type hygiénique, économique ou social poussent à choisir l’incinération – choix qui ne doit pas être contraire à la volonté expresse ou raisonnablement présumée du fidèle défunt –, l’Église ne voit pas de raisons doctrinales pour prohiber cette pratique. En effet, l’incinération du cadavre ne touche pas à l’âme et n’empêche pas la toute-puissance divine de ressusciter le corps; elle ne contient donc pas, en soi, la négation objective de la doctrine chrétienne sur l’immortalité de l’âme et la résurrection des corps13.
L’Église continue d’accorder la préférence à l’inhumation des corps, car celle-ci témoigne d’une plus grande estime pour les défunts; toutefois, l’incinération n’est pas interdite, «à moins qu’elle n’ait été choisie pour des raisons contraires à la doctrine chrétienne»14. Lorsqu’il n’existe pas de motivations contraires à la doctrine chrétienne, l’Église accompagne, après la célébration des obsèques, le choix de l’incinération avec d’opportunes directives liturgiques et pastorales, en veillant surtout à éviter toute forme de scandale ou d’indifférentisme religieux.

5. Si, pour des raisons légitimes, l’on opte pour l’incinération du cadavre, les cendres du défunt doivent être conservées normalement dans un lieu sacré, à savoir le cimetière ou, le cas échéant, une église ou un espace spécialement dédié à cet effet par l’autorité ecclésiastique compétente.

La conservation des cendres dans un lieu sacré peut contribuer à réduire le risque de soustraire les défunts à la prière et au souvenir de leur famille et de la communauté chrétienne. De la sorte, on évite également d’éventuels oublis et manques de respect qui peuvent advenir surtout après la disparition de la première génération, ainsi que des pratiques inconvenantes ou superstitieuses.
6. Pour les motifs énumérés ci-dessus, la conservation des cendres dans l’habitation domestique n’est pas autorisée. C’est seulement en cas de circonstances graves et exceptionnelles liées à des conditions culturelles à caractère local que l’Ordinaire, en accord avec la Conférence épiscopale ou le Synode des évêques des Églises orientales, peut concéder l’autorisation de conserver des cendres dans l’habitation domestique.
7. Pour éviter tout malentendu de type panthéiste, naturaliste ou nihiliste, la dispersion des cendres dans l’air, sur terre, dans l’eau ou de toute autre manière, n’est pas permise; il en est de même de la conservation des cendres issues de l’incinération dans des souvenirs, des bijoux ou d’autres objets. En effet, les raisons hygiéniques, sociales ou économiques qui peuvent motiver le choix de l’incinération ne s’appliquent pas à ces procédés.

8. Dans le cas où le défunt aurait, de manière notoire, requis l’incinération et la dispersion de ses cendres dans la nature pour des raisons contraires à la foi chrétienne, on doit lui refuser les obsèques, conformément aux dispositions du droit16.
Au cours de l’audience accordée le 18 mars 2016 au Cardinal Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, le Souverain Pontife François a approuvé la présente Instruction, décidée lors de la Session …
Publication des normes sur
la pratique tolérée de la crémation.